Poussée des mains 2/2

L’exercice de la poussée des mains est difficile à transmettre. S’il s’appuie sur des règles trop rigides on ne peut en percevoir toute la richesse et s’il n’y a pas de cadre on sombre assez vite dans le n’importe quoi. C’est pour ces raisons que beaucoup d’écoles renoncent à l’intégrer dans leur programme. Sans la poussée des mains, le Taichi Chuan se résume alors en un Qi Gong inutilement compliqué !

Codifier l’apprentissage

Pour commencer, après avoir compris le principe des 4 qualités de base de la poussée des mains, il est souhaitable d’apprendre quelques "passes" ou "plans" qui permettront d’avoir en mémoire des repères. Ces repères sont classiquement appelés "potentiels" ou "portes (d’accès)" et sont au nombre de 8.

Peng : emplir - parer [1]
Lu : absorber/dévier - tirer
Ji : pénétrer - presser
An : repousser - pousser

Cai : crocheter - cueillir
Liè : séparer - séparer
Zhou : jouer des coudes - coup de coude
Kao : bousculer - coup d’épaule (ou autres parties du corps)

L’apprentissage patient de ces 8 portes codifiées va nous donner de l’aisance dans le travail à deux [2]. Notions de distances, de contacts, de déplacements, de timing, d’intensité, d’économie ou au contraire d’épuisement.

Pratique libre

S’il est toujours question d’apprentissage, nous ne sommes plus dans le même registre. Nous sortons de l’aspect codifié pour improviser et peut-être avoir l’opportunité de "placer" un geste mémorisé des 8 portes. Avec le temps (beaucoup de temps), tout ceci doit se faire avec le moins de calcul possible, de façon instinctive, en fonction de la situation qui change en permanence et qu’on ne peut prévoir. C’est l’intelligence du corps qui s’exprime. Il est certain que cette étape nécessite d’avoir des partenaires de qualité pour éviter de retomber immédiatement dans les tensions qui nourrissent nos gestes à nos débuts.

Tui Shou - Poussée des mains - Art martial

La poussée des mains devient progressivement un exercice très agréable avec une gamme très large d’applications. Du simple échange fluide et codifié jusqu’à l’art martial, toutes les options de pratique vont pouvoir s’exprimer. L’art du Taiji (la juste mesure du Yin-Yang) est ici dans les conditions optimales pour se révéler (ou pas ! :-)

Philippe Thiriot

[1] J’ai choisi de mettre en caractère gras un terme provisoire qui me parle plus que la traduction classique (à droite) que l’on retrouve dans tous les livres. Je détaillerai ces 8 idéogrammes dans une autre note.

[2] 8 portes, 八門 - Ba Men : il existe des "chants", sortes de poèmes rythmés et rimés qui ne disent rien de la technique à mettre en place mais qui donnent des images à mettre en œuvre. Chaque chant est composé de 8 vers de 5 idéogrammes. Un pur hasard évidemment qui correspond étrangement aux 8 "ressorts" et 5 pas.